Gaz de schiste : une ouverture dans l'Aisne
Publié le 25 Novembre 2012
Les pétroliers vont-ils fracturer le sol du département à la recherche de gaz de schiste ? Un permis les y autorise, à certaines conditions. Bien trop floues, selon les associations d'opposants.
Les maires de l'Omois ont besoin d'une information complète pour décrypter le discours des pétroliers. |
INTERDITE, la fracturation hydraulique pour l'exploitation des gaz et huiles de schistes, en France ? « C'est exactement ce que l'on entend de manière uniforme dans la plupart des médias audiovisuels », regrette Elisabeth Bourgue, présidente de l'association No Fracking France (NFF). « Seulement, poursuit-elle, c'est loin d'être aussi simple. La fracturation, elle est autorisée. À certaines conditions. »
Dans le département, et spécialement au sud, exceptés les plus vigilants regroupés au sein d'associations telles Les Intouchables ou Carmen, on a du mal encore à cerner les contours du sujet. Pourtant, s'il y a un périmètre clairement défini, c'est bien celui de ce que l'on nomme, depuis 2009, le « Permis de Château-Thierry ».
Une exception
Le 4 septembre, il y a trois ans, le ministre de l'Écologie et du Développement durable, Jean-Louis Borloo, autorisait en effet la société Toreador Energy France SCS, à explorer le sous-sol local à la recherche « de mines d'hydrocarbures liquides ou gazeux ». Le territoire est délimité. Il couvre… 779 km2.
« La plupart des permis ont été accordés en 2008 et 2009 », explique Fabien Vallée, le vice-président de l'association NFF. « Dans ces textes, il est question d'hydrocarbures non conventionnels. C'est ce qui a trompé les associations. On s'est rendu compte qu'il s'agissait donc d'hydrocarbures infiltrés dans la roche et qu'il y avait le risque de voir les partisans de la fracturation hydraulique appuyer cette technique. »
La densité de l'Hexagone n'a rien de commun avec les vastes territoires américains ou canadiens sur lesquels les grandes compagnies comme Vermillon ou Hess Oil déploient leurs puits. « Il y a un réel danger de contamination des nappes phréatiques si la fracturation est employée chez nous », assure Severin Pistre, hydrogéologue à l'université de Montpellier.
L'Etat a, semble-t-il, pris la mesure du problème. Depuis une loi du 13 juillet 2011, la technique dite de la fracturation hydraulique est interdite pour toute exploration d'hydrocarbures. « Mais si l'on entre dans le détail du texte, signale Elisabeth Bourgue, on s'aperçoit que l'article 4 autorise l'emploi de la fracturation à des fins de recherche scientifique. Des commissions, dont on n'a absolument aucune nouvelle, doivent encadrer tout le processus. »
Olivier Alers, le président de l'association Les intouchables, est aux premières loges. Il habite à quelques encablures de Rozoy-Bellevalle, là où la société Toreador a prévu d'installer un forage. « Il y a un déficit d'information considérable. Les élus, qui sont les premiers concernés, sont souvent mis au courant lorsque tout est déjà prêt. »
Au-delà des aspects techniques et environnementaux de ces recherches, beaucoup reste à faire pour peser face au lobbying alimenté par les pétroliers. « Nous organisons des colloques comme celui de Marchais-en-Brie, la semaine dernière. Les élus ont l'occasion d'y rencontrer des spécialistes du sous-sol, des médecins ou des juristes », résume la présidente de No Fracking France.
Le Permis de Château-Thierry mentionne un engagement financier de la société Toreador de 1 600 000 euros. Injecter autant d'argent pour ne pas exploiter un jour des gaz ou huiles de schiste, paraît étrange aux membres des collectifs et associations opposés à ces forages. Peut-on leur donner tort ?
© L'union - Yves KLEIN
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