Climat : le système de courant majeur de l’océan Atlantique instable et proche du seuil critique ?
Publié le 16 Août 2021
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Groenland, le 16 juin 2018. L'Amoc est un système complexe de courants océaniques qui s’inverse dans l’Atlantique nord. REUTERS/Lucas Jackson |
La circulation méridienne de retournement atlantique, dont le Gulf Stream fait partie, aurait perdu de sa stabilité, selon une étude. Cette perturbation pourrait conduire à l’effondrement du système, ce qu’il faut à tout prix éviter, alertent des scientifiques.
Notre planète risque-t-elle de changer radicalement de visage ? Dans une étude publiée jeudi par Nature Climate Change, Niklas Boers, de l’Institut de recherche sur l’impact du changement climatique de Potsdam (Allemagne), annonce avoir détecté des signaux précoces de l’effondrement du courant majeur de l’océan Atlantique (Amoc), dont le Gulf Stream fait partie.
Un tel événement bouleverserait les grands équilibres climatiques. Si l’Amoc s’arrêtait, le Gulf Stream -courant océanique s’écoulant d’est en ouest dans l’Atlantique nord- n’apporterait plus de chaleur vers les hautes latitudes et l’Europe en serait affecté, avec un climat plus froid en hiver ainsi qu’une augmentation des tempêtes. « Mais l’impact le plus important se passerait plus bas, au niveau des tropiques », explique au Parisien Didier Swingedouw, climatologue au laboratoire environnements et paléoenvironnements océaniques et continentaux au CNRS.
Le système des moussons, dont dépendent des milliards de personnes pour se nourrir en Inde, en Amérique du Sud et en Afrique de l’Ouest, « serait modifié ». « L’Afrique de l’Ouest, notamment, deviendrait désertique ». Le nord de la forêt amazonienne « recevrait moins de pluie, a contrario du sud, causant d’importants mouvements migratoires », ajoute le chercheur, qui reste néanmoins « un peu dubitatif » face aux conclusions de l’étude parue jeudi.
Un tel événement bouleverserait les grands équilibres climatiques. Si l’Amoc s’arrêtait, le Gulf Stream -courant océanique s’écoulant d’est en ouest dans l’Atlantique nord- n’apporterait plus de chaleur vers les hautes latitudes et l’Europe en serait affecté, avec un climat plus froid en hiver ainsi qu’une augmentation des tempêtes. « Mais l’impact le plus important se passerait plus bas, au niveau des tropiques », explique au Parisien Didier Swingedouw, climatologue au laboratoire environnements et paléoenvironnements océaniques et continentaux au CNRS.
Le système des moussons, dont dépendent des milliards de personnes pour se nourrir en Inde, en Amérique du Sud et en Afrique de l’Ouest, « serait modifié ». « L’Afrique de l’Ouest, notamment, deviendrait désertique ». Le nord de la forêt amazonienne « recevrait moins de pluie, a contrario du sud, causant d’importants mouvements migratoires », ajoute le chercheur, qui reste néanmoins « un peu dubitatif » face aux conclusions de l’étude parue jeudi.
Perte de stabilité
La circulation méridienne de retournement atlantique, aussi appelée Amoc, est un système complexe de courants océaniques qui s’inverse dans l’Atlantique nord. Des eaux de surface chaudes de l’équateur rejoignent les hautes latitudes dans l’Atlantique-Nord, où, refroidies et salées -donc plus lourdes-, les eaux de surface plongent et descendent en profondeur vers l’océan Austral.
D’après une notion théorique qui date des années 1960 - « et qui est encore débattue », nous précise Didier Swingedouw- l’Amoc présenterait deux états stables : quand la circulation des courants est forte et quand elle est faible. Les données d’observation suggèrent « un affaiblissement progressif de l’Amoc au cours des dernières décennies », écrit Niklas Boers, qui a cherché à savoir si cette diminution était liée à une variation naturelle ou bien si elle était la signature du changement climatique. Or si l’Amoc s’affaiblit jusqu’au « point de bascule », « la circulation va s’arrêter et il n’y a pas de raison qu’elle reparte avant un long moment », indique Didier Swingedouw.
La grande question qui préoccupe la communauté scientifique est donc de savoir si ce fameux point de bascule a été atteint. Niklas Boers a étudié huit ensembles de données de température et de salinité mesurés indépendamment et remontant à 150 ans. D’après ses conclusions, « l’affaiblissement de l’Amoc au cours du siècle dernier est susceptible d’être associé à une perte de stabilité », annonce le chercheur. Cette perturbation du système pourrait conduire à son effondrement : « Le déclin de l’Amoc n’est pas seulement une fluctuation ou une réponse linéaire à l’augmentation des températures, mais signifie probablement l’approche d’un seuil critique au-delà duquel le système de circulation pourrait s’effondrer », avance Niklas Boers.
D’après une notion théorique qui date des années 1960 - « et qui est encore débattue », nous précise Didier Swingedouw- l’Amoc présenterait deux états stables : quand la circulation des courants est forte et quand elle est faible. Les données d’observation suggèrent « un affaiblissement progressif de l’Amoc au cours des dernières décennies », écrit Niklas Boers, qui a cherché à savoir si cette diminution était liée à une variation naturelle ou bien si elle était la signature du changement climatique. Or si l’Amoc s’affaiblit jusqu’au « point de bascule », « la circulation va s’arrêter et il n’y a pas de raison qu’elle reparte avant un long moment », indique Didier Swingedouw.
La grande question qui préoccupe la communauté scientifique est donc de savoir si ce fameux point de bascule a été atteint. Niklas Boers a étudié huit ensembles de données de température et de salinité mesurés indépendamment et remontant à 150 ans. D’après ses conclusions, « l’affaiblissement de l’Amoc au cours du siècle dernier est susceptible d’être associé à une perte de stabilité », annonce le chercheur. Cette perturbation du système pourrait conduire à son effondrement : « Le déclin de l’Amoc n’est pas seulement une fluctuation ou une réponse linéaire à l’augmentation des températures, mais signifie probablement l’approche d’un seuil critique au-delà duquel le système de circulation pourrait s’effondrer », avance Niklas Boers.
Système très fragile
Pourquoi l’Amoc aurait-elle été déstabilisée ? L’activité humaine en est-elle une des causes ? L’étude ne le dit pas. Mais elle remonte aux 150 dernières années, soit l’ère post-industrielle, et selon une théorie avancée par la communauté scientifique -bien que pas encore prouvée-, le réchauffement climatique pourrait contribuer à l’affaiblissement de l’Amoc. « La fonte de la calotte glaciaire du Groenland et l’augmentation des précipitations fournissent un apport en eau douce » qui serait susceptible de perturber le système, explique Didier Swingedouw.
Quand cet effondrement pourrait-il avoir lieu ? Impossible pour le moment de prévoir une date tant le système Amoc est complexe et l’avenir des niveaux de réchauffement mondial incertain. « Mais l’impact colossal engendré rappelle que cela ne doit jamais se produire », a déclaré l’auteur de l’étude au Guardian. « La seule chose à faire est de maintenir les émissions de CO2 aussi basses que possible. »
Cette étude montre que « l’Amoc est très fragile, que le système climatique n’est pas stable », constate auprès du Parisien l’océanographe et climatologue Julie Deshayes, chercheuse au CNRS. « Si, en plus, le système est perturbé par l’homme, alors on se met dans une position de grave danger. Comme on sait que les émissions de CO2 ont un impact fort sur le climat, ça doit nous mobiliser à les réduire. »
Quand cet effondrement pourrait-il avoir lieu ? Impossible pour le moment de prévoir une date tant le système Amoc est complexe et l’avenir des niveaux de réchauffement mondial incertain. « Mais l’impact colossal engendré rappelle que cela ne doit jamais se produire », a déclaré l’auteur de l’étude au Guardian. « La seule chose à faire est de maintenir les émissions de CO2 aussi basses que possible. »
Cette étude montre que « l’Amoc est très fragile, que le système climatique n’est pas stable », constate auprès du Parisien l’océanographe et climatologue Julie Deshayes, chercheuse au CNRS. « Si, en plus, le système est perturbé par l’homme, alors on se met dans une position de grave danger. Comme on sait que les émissions de CO2 ont un impact fort sur le climat, ça doit nous mobiliser à les réduire. »
Observations indirectes
Pour Didier Swingedouw, l’étude comprend toutefois plusieurs limites. Niklas Boers « se base notamment sur des observations indirectes », souligne-t-il. Des observations directes sont possibles depuis 2004 et l’installation d’un vaste système de mesures. Mais pour tout ce qui a eu lieu avant cette date, « on a recours à des artefacts, des rapports sur la température par exemple, alors que celle-ci peut être modifiée par les vents », explique le climatologue.
En outre, les données utilisées « ne sont pas récentes », note également Julie Deshayes. « Il n’y a rien d’urgent dans cette étude, la nouveauté réside dans le fait qu’elle a été publiée maintenant. »
En outre, les données utilisées « ne sont pas récentes », note également Julie Deshayes. « Il n’y a rien d’urgent dans cette étude, la nouveauté réside dans le fait qu’elle a été publiée maintenant. »
© Juliette Pousson pour LeParisien.fr
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